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lundi 14 mars 2016

Ciboure - Irun



                  Jeudi 3 septembre 2015 : Ciboure  -  Irun  16 km

     Aujourd’hui j’ai prévu de gagner Irun : une petite étape sans grand dénivelé que j’ai voulue ainsi, pour poursuivre doucement ma mise en jambe. Gérard, mon colocataire, a décidé d’allonger cette étape d’une dizaine de kilomètres pour rejoindre le Pasajes de San Juan. À ce moment, je pense que je ne le reverrai plus, qu’il est tout à fait du genre à faire deux étapes en une.
     Je quitte le gîte vers 8 heures. Il a fait un violent orage dans la nuit avec beaucoup de pluie et ce matin le sentier en a gardé les traces : la terre est grasse et colle aux chaussures. Le chemin du littoral qui part de Socoa longe la côte au plus près, offrant encore ce  décor original de piles d’assiettes, si spécifique à la région.  Peu avant Hendaye, après avoir longé le Domaine d’Abbadia, un site naturel, propriété du Conservatoire du littoral, je prends le temps d’en visiter le château : un édifice de style néo-gothique  construit par Eugène Viollet-le-Duc et classé monument historique. 
Le château d'Abbadie

  J’atteins Hendaye vers 11 heures et ici encore je  quitte les chaussures pour me rafraîchir les pieds dans l’océan. Je suis tenté par le bain, mais pour un pèlerin, c'est toujours compliqué : il faut passer le maillot de bain, abandonner le sac sur la plage le temps de la baignade puis se sécher. Toutes ces contraintes m’y font renoncer.
    À ce niveau la ville n’est séparée de l’Espagne que par un estuaire de quelques centaines de mètres sur la rivière Bidassoa. Deux solutions permettent de le franchir à pied sec : utiliser une des navettes qui toutes les demi-heures  font des allers-retours entre les deux rives pour transporter les touristes, ou alors, remonter beaucoup plus en amont pour prendre le premier pont qui traverse la rivière, le pont d’Espagne. C’est l’idée que j’avais privilégiée en préparant mon parcours, mais avant de me lancer, j’en discute avec un vieil  homme qui promène son chien. Je vois tout de suite à ses mimiques que ma question l’étonne car pour lui la réponse est évidente. Il me conseille la navette maritime plutôt que le pont qui d’après lui, est beaucoup trop loin. Je l’écoute et suis ses recommandations à la lettre sans être vraiment convaincu que c’est le  meilleur choix. Le problème, lorsque l’on interpelle un passant, c’est que lui n’a pas forcément les mêmes références que nous : un kilomètre à pied peut lui paraître la mer à boire, alors que pour nous qui parcourons 30 kilomètres par jour, ça relève de la simple formalité. Et puis, sur le Chemin, recourir à un autre moyen de transport que mes pieds me fait toujours un peu culpabiliser. Le bateau me dépose à Hondarribia, un village que j'avais connu dans une vie antérieure et dont j’avais gardé excellent souvenir. Encore en activité, lors d’un de ces séminaires destinés à remotiver l’encadrement (comme s’il en était besoin !), nous avions clôturé la session par la visite du bourg, suivi d’un dîner dans une cidrerie. Une  soirée d’exception dont j’ai gardé beaucoup d’images en tête : les côtes de bœuf que la plupart d’entre nous avaient choisies, servies sur de larges planches, le tirage du cidre au tonneau, les discussions avec les amis… ! Je gagne Irun par une longue rue en bordure de l’aéroport ; il est 13 heures lorsque je pousse la porte de la pension « Los Fronterizos » dans laquelle j’ai réservé une chambre pour la nuit ; elle est située à proximité du centre-ville. Je dois être complètement « cassé » par ces premiers jours de marche, car sitôt la douche prise, je m’endors pour ne me réveiller qu’à 17 heures. Il me reste un peu de temps pour visiter cette ville de 60.000 habitants que jusque-là je ne connaissais que de nom. Puis vient l’heure du dîner que l’on nomme ici « la cena ». Je fais le tour de la grande place Luis Mariano ; elle est entourée de  bars et de restaurants avec des terrasses où règne cette ambiance de fin de soirée bien typique à l’Espagne. Pour la plupart, il s’agit de bars à tapas, ces petites compositions d’une ou deux bouchées que les clients dégustent avec un verre de vin au moment de l’apéritif. J’aime cette  atmosphère, mais ce soir ce n’est pas cela que je cherche : après cette journée de marche, j’ai besoin d’un restaurant où l’on me serve à table un menu complet du type « menu del pérégrino » comme ça existe un peu partout sur le chemin. J’en déniche enfin un, tout près de la gare où pour 11.50 euros le repas est assez exceptionnel avec en plat principal des « chippirones » à la plancha accompagnés de frites et de poivrons cuits : un vrai délice.
Dîner aux chippirones



                                 




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